jeudi 21 février 2008

Hippies et summer of love.


Hippies lors du festival de Woodstock.

Le mouvement hippie se développe approximativement de 1965 à 1969. Ces jeunes sont les héritiers de la beat generation, un mouvement en révolte contre le système et la société de consommation américaine des années 1950. D’ailleurs le livre de Jack Kerouac « Sur la route » devient le livre culte pour toute une génération en rupture avec l’idéologie dominante. La jeunesse s’identifie alors à la vie de bohème et prend la route. Les hippies doivent ainsi beaucoup à ces beatniks.


Les hippies veulent rompre avec la société et leurs familles. Nés au lendemain de la guerre et souvent issus des classes moyennes et aisées, les hippies rejettent ainsi les valeurs de leurs parents.

* Que souhaitent-ils ?

S’ils ne parviennent pas à changer la société, ils souhaitent en tout cas s’en échapper. Ils veulent bâtir un monde nouveau fondé sur les valeurs d’amour, de paix et de partage.


Make love, not war.

- Ils multiplient les manifestations contre la guerre du Vietnam et ne jurent que par la non-violence. L’ère du « Flower power » est ouverte, les armes doivent céder la place aux fleurs, dans un monde redevenu pacifique.


Groupe de hippies en pleine méditation

- Ils vivent en communautés, souvent dirigées par un mentor ou gourou, et s’adonnent à la méditation, ils opposent l’expérience spirituelle au matérialisme. Les philosophies ou religions orientales (bouddhisme, zen, mantra, yoga) sont alors en vogue. L’Orient fascine, car il serait porteur de sagesse et d’une vraie spiritualité, aussi des milliers de jeunes se rendent alors en Inde ou au Népal (route de la drogue).

Les hippies souhaitent engager une vraie libération sexuelle.

- Pour les hippies, la sexualité doit s’affranchir de la morale puritaine. La notion de péché est mise au placard. Le sexe, débarrassé de ses entraves, devient un mode de communication, d’expression. De fait, on assiste à une vraie libération sexuelle (permise aussi par la diffusion de la pilule). Les hippies se dénudent et sont fiers de leurs corps. La notion de partage vaut aussi en matière sexuelle (Love-in). Cette quête d’une « révolution sexuelle » s’inspire des ouvrages du psychanalyste W. Reich, mais aussi d’H. Marcuse, autre grande figure hédoniste et contestataire, auteur d’ « Eros et civilisation ». Pour eux, seule une sexualité épanouie, jouissive, permet d’échapper aux névroses et au malheur.


Affiche de concert.

* Le psychédélisme est alors la grande affaire de l’époque.
Etymologiquement, le terme signifie « révélateur d’âme ». Le terme psychédélique désigne un état psychique altéré par des hallucinogènes (le LSD par exemple), comportant des hallucinations et une exacerbation des sensations. Tous les moyens permettant d’ouvrir le plus large possible les « portes de la perception » sont les bienvenus : les lumières et couleur, les voyages et surtout les drogues. En effet, la consommation de drogues hallucinogènes facilite le voyage intérieur et ouvre la conscience à des perceptions exacerbées.



Affiche du festival de Woodstock en 1969.

- La musique rock constitue un vecteur privilégié pour ce mouvement hippie. De gigantesques festivals musicaux rassemblent des dizaines de milliers d'Américains venus écouter les groupes phares de l'acid-rock ou rock psychédélique (Monterey, Woodstock, Altamont).


Dessins du génial Crumb.

Le mode de vie prôné par la devise de Timothy Leary, surnommé le pape du LSD (acide lysergique), « Turn on, tune in, Drop out », « Branche toi (aux événements), Accorde-toi (aux vibrations ambiantes), Laisse tout tomber », résume bien les attentes des hippies.

* Le Summer of Love (été 1967), point d’orgue du mouvement.


Affiche ommémorative du Summer of love.


Le mouvement, d’abord très marginal, enfle rapidement et à pour épicentre la côte ouest des Etats-Unis, notamment le quartier d’Aight Ashbury de San Francisco (vite surnommé Hashbury). Courant 1967, des milliers de jeunes convergent vers le quartier. Des jeunes qui fuient leurs maisons, leurs parents et les valeurs de ces derniers, qu’ils jugent étriquées. Ils vivent en communautés, se rassemblent par milliers dans les parcs.



Allen Ginsberg lors d'un Human Be-in.

Ces hippies arborent des tenues bariolées, cheveux longs flottants au vent. Ils se rassemblent par dizaine de milliers dans des Human Be-in, de grands rassemblements festifs et musicaux dans lesquels ils peuvent s’adonner à leurs passions (méditation, amour libre, écologisme, pacifisme, consommation de substances hallucinogènes). Tous entendent libérer leurs esprits des contraintes matérielles qui les étouffent.

Des foules immenses se rassemblent lors des festivals de musique.

Durant tout l'été 1967, lors de grands rassemblements, les jeunes vivent au rythme de la devise "sex, drogs and rock'n'roll". Très vite, la situation se gâte, le quartier n'attire plus seulement les hippies, mais aussi des touristes qui photographient cette faune hirsute. Certains repèrent vite le bon filon et récupèrent ce mouvement hostile au capitalisme triomphant. D’ailleurs en octobre, les hippies organisent l’enterrement du mouvement sur les hauteurs de San Francisco.


L'enterrement symbolique du mouvement hippie.


* La fête est finie.


Charles Manson et sa "family".

Le mouvement se prolonge néanmoins jusqu’en 1969. La pression policière se fait de plus en plus forte. La consommation de LSD devient illégale en octobre 1966, les arrestations se multiplient.

Rapidement la situation se dégrade: l'héroïne remplace l'acide, l'amour libre se transforme parfois en viol collectif et les violences (pas nécessairement liées directement au mouvement) se multiplient. Ainsi, un certain Charles Manson se découvre une vocation de gourou. Il recrute un groupe d'adeptes qui lui obéit aveuglémént. Le 9 août 1969, cette "Mansion family" tue 5 personnes dans une villa d'Hollywood, dont la jeune actrice Sharon Tate, enceinte de 8mois. Au lendemain du massacre, les Californiens se barricadent dans leurs villas.

Lors du concert des Rolling Stones au festival d'Altamont en décembre 1969, un membre des Hell's Angels assassine un Afro-Américain. C'en est fini de l'insouciance des cinq dernières années, la fin des sixties.

Qu'écoutait-on à l'époque?

* De nombreux titres célèbrent les mérites des substances hallucinogènes et décrivent leurs effets sur l'esprit et l'organsime.
- Le Sunshine superman de Donovan et le Good day sunshine des Beatles font référence au LSD autrement appelé Sunshine.

free music


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- Les paroles de Purple haze d'Hendrix évoquent aussi la consommation de drogue:
"une brume mauve dans ma tête / désormais les choses ne sont plus les mêmes / je me comporte bizarrement, mais je ne sais pas pourquoi,/ [...] je ne sais si je monte ou si je redescends / suis-je heureux ou malheureux?"

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- White rabbit du Jefferson Airplane conte l'épopée d'une Alice des temps modernes, en plein trip:
"quand les types sur l'échiquier / se lèvent et te disent où aller / et que tu viens de prendre une sorte de champignon / que ton esprit fonctionne lentement / va demander à Alice / je pense qu'lle saura."

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- Les intiales du Lucy in the sky with diamonds des Beatles font référence au LSD.

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- Enfin, le titre de Dylan, "Everybody must get stoned" (tout le monde doit se défoncer) est suffisamment explicite pour que l'on y revienne.

* Le titre un rien niaiseux de Scott Mckenzie, "San Francisco (be sure to wear some flowers in your hair)", célèbre San Francisco, épicentre du mouvement hippie:
" Si tu vas à San Francisco / prends de soin de porter des fleurs dans tes cheveux / Si tu vas à San Francisco / tu y rencontreras des gens très doux..."

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* Le titre For what it's worth du Buffalo Springfield revient sur la répression des manifestations étudiantes par la police:

"Quelque chose de bizarre se prépare / mais je ne sais pas quoi / il ya untype armé là bas / qui me met en garde / je crois qu'il vaudrait mieux arrêter les enfants /
Eh! C'est quoi ce boucan / tout le monde regarde ce merdier / il y a des lignes de front qui se dessinent / personne n'a raison si tout le monde a tort / les jeunes qui s'expriment rencontrent tant de résistances du passé".

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On peut sans doute y voir une référence au Free speech Movement. De 1964 à 1968 ce mouvement étudiant parti de l'université californienne de Berkeley entend défendre la liberté d'expression des étudiants. Or, les autorités universitaires se montrent souvent réticente aux prises de paroles de la jeunesse contestataire sur les campus. Elle n'hésite pas à solliciter à l'occasion les forces de l'ordre pour faire cesser les manifestations.

Sources:
- La série Summer of love dans les archives du Monde 2 tout au long de l'été 2007.
- Le formidable "Protest song_ la chanson protestataire dans l'Amérique des Sixties" d'Yves Delmas et Charles Gancel, éditions Textuel, 2005.
- André Kaspi:"Etats-Unis 1968. L’année des contestations". Editions Complexe, 1988.
- Howard Zinn:"Une histoire populaire des États-Unis. De 1492 à nos jours", Agone, 2002.

Liens:
- La contestation étudiante contre la guerre du Vietnam.
Un travail réalisé par Pascal Knipiler et Jeremy Ferrand (TL) sur le blog de M. Tiboulloy.
- 1967: le festival de Monterey et l’apogée du rock psychédélique sur bricabraque.

4 commentaires:

  1. Merci pour ce voyage dans le temps (sans avoir recours aux substances mentionnées...).
    A voir sur le concert d'Altamont le documentaire Gimme Shelter, diffusé l'été dernier sur Arte. Il montre bien la période du désenchantement, la difficulté à jouer devant une foule peu respectueuse de certaines règles...

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  2. Exact, je ne connais pas le documentaire, mais il doit être très intéressant. Je prépare deux articles sur les festivals rock de la période, celui de Woodstock et un autre sur le cauchemardesque festival d'Altamont.

    J.B.

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  3. Une trilogie Monterrey, Woodstock, Altamont ?

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